Artémidore de Daldis (dit parfois Artémidore d'Éphèse, ce qui crée une confusion avec Artémidore le géographe) est un auteur grec spécialiste d'onirocritique du IIe siècle, né sans doute à Éphèse. Son ouvrage en grec intitulé Oneirokritika condense tout le savoir antique sur la divination par le rêve et servira durant des siècles d’ouvrage de référence sur la question. Il fut lu et relu par Sigmund Freud.
L’Antiquité n’a pas cessé de s’intéresser au rêve, perçu comme un lien entre l’homme et tout ce qui le dépasse. Pour reprendre une phrase de Freud (Sur les rêves), on pourrait dire que les Anciens tenaient le rêve « pour une information soit bienveillante soit hostile de puissances supérieures, dieux et démons. »
Dès l’époque des poèmes homériques, au VIIIe s. av. J.-C., il est question de gens qui interprètent les rêves (les oneiropoloi, Iliade, I, 63). À partir du Ve s., les textes grecs commencent à employer le terme d’oneirokritès pour désigner ces interprètes des rêves. Ce sont souvent des gens modestes qui s’adressent à un public populaire qu’ils rencontrent à l’agora ou à l’occasion des grands rassemblements de pèlerins, lors des panégyries. Pour une petite somme d’argent, ils expliquent de manière mécanique les rêves de ceux qui viennent les trouver (par exemple, Aristophane, Les Guêpes, 52-53).
Parallèlement, les rêves jouent un rôle religieux de plus en plus grand, ainsi dans le culte d’Asclépios. Cela entraîne le développement d’une médecine de sanctuaire fondée sur les rêves des malades en consultation. D’autres onirocrites se mettent au service des puissants, comme Aristandros de Telmessos avec Alexandre le Grand. Ces professionnels, conscients de la technicité de leur art qu’ils pratiquent avec méthode, suscitent la rédaction de traités théoriques et pratiques. De toute cette production, seuls les Oneirokritika d’Artémidore ont subsisté.
L'onirocritique
Les préfaces aux livres I et IV s’efforcent en effet d’exposer les principes de base et les méthodes de l’onirocritique. Elles permettent de voir le soin qu’il a mis à rassembler sa documentation. Non seulement il a voyagé et rencontré toutes sortes d’onirocrites (voir ci-dessus), mais il a aussi collecté le plus grand nombre de traités d’onirocritique qu’il pouvait (I, dédicace) ; il mentionne d’ailleurs assez souvent ses devanciers. Artémidore exerçait aussi la fonction d’interprète des rêves, sans doute auprès d’un public aisé qui devait le payer. L’encyclopédie de La Souda lui attribue trois ouvrages différents : les Oneirokritika, mais aussi un traité de divination d’après le vol des oiseaux (les Oiônoskopika) et enfin un traité sur la lecture des lignes de la main (les Kheiroskopika). Le traité sur le vol des oiseaux est aussi mentionné par Galien, mais l’attribution à Artémidore d’un traité sur les lignes de la main est certainement fausse dans la mesure où il parle de ceux qui font cela comme de charlatans (II, 69). Artémidore lui-même dit qu’il a écrit de nombreux livres (III, conclusion). Quoi qu’il en soit, les Oneirokritika sont le seul ouvrage de lui qui nous est parvenu.
Il faut ajouter que, bien qu’il s’agisse de divination, et donc, de notre point de vue, de superstition, Artémidore se place dans une perspective largement rationaliste, avec une exigence de rigueur méthodique qui distinguait sans doute son ouvrage parmi les autres du même genre.
En plus de pratiquer l’onirocritique, Artémidore avait lu tous les anciens traités et fréquenté de nombreux devins, apprenant ainsi à connaître les songes qui se racontent ici et là. Loin d’être un charlatan, Artémidore est convaincu de faire œuvre utile et scientifique. Il s’explique sur son art avec d’autant plus de candeur que certaines parties de son ouvrage ne sont pas destinées au public, mais à son fils seulement, tel l’ensemble du livre IV. Dans cette section, il s’efforce d’aller plus au fond de la science des rêves afin de donner à son fils des outils d’interprétation qui en feront « un interprète des songes meilleur que tous ou du moins non inférieur à aucun autre».
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